Monday, November 26, 2012

envisager l’équation énergétique dans toute sa complexité:durée de vie des batteries lithium des voitures électriques et construire le réseau des bornes et des services

Une étude du cabinet Oliver Wyman estime que le surcoût lié à la batterie s’élève à 20 000 euros. Autre incertitude, l’autonomie, qui oscille entre 100 et 200 kilomètres et la destine surtout aux zones urbaines et péri-urbaines. En outre, les batteries ont une durée de vie limitée, de 10 000 à 50 000 km, selon les spécialistes. Un rapide calcul montre qu’à raison de 50 km par jour durant deux cent vingt jours, la batterie tiendra au mieux cinq ans, ce qui est insuffisant.

Enfin, et surtout, le lithium, utilisé dans les batteries de nouvelle génération est certes recyclable mais ses réserves limitées (4 millions de tonnes extractables) sont concentrées dans quelques pays et permettent au mieux une production mondiale de 8 millions de voitures électriques par an. En outre, le prix du lithium est passé de 350 à 3 000 euros la tonne entre 2003 et 2008.

Ces contraintes limitent l’utilisation de la voiture électrique et la rendent surtout très chère à l’achat. Si les constructeurs la facturaient au coût réel, une petite voiture électrique coûterait bien plus de 40 000 euros. Naturellement, les prix devraient baisser et la capacité des batteries augmenter dès que la production en série sera lancée. Mais pour les constructeurs, le coût de fabrication d’un véhicule électrique reste sans commune mesure avec celui d’un véhicule thermique.

Mais le principal obstacle au développement massif de la voiture électrique est lié aux infrastructures et à l’augmentation considérable de la production électrique que suppose une telle mutation. Non seulement, il faudra équiper nos villes de bornes électriques en nombre suffisant mais la circulation d’un nombre croissant de véhicules électriques nécessite un véritable saut qualitatif en matière de gestion intelligente du réseau, pour "lisser" la consommation totale et éviter les ruptures de charge. Enfin, il est absolument indispensable que l’augmentation considérable de la production électrique nécessaire dans la perspective d’un parc automobile majoritairement électrique se fasse sans impact sur l’environnement, c’est-à-dire sans augmenter d’un gramme nos émissions de carbone.
Or, au niveau européen, il faut savoir que le "bilan carbone" d’une voiture électrique est proche de celui des voitures thermiques récentes car la part des énergies fossiles dans la production électrique européenne reste très importante. Avec l’arrivée massive de voitures thermiques ou hybrides émettant moins de 100 grammes de CO2 par km à l’horizon 2015, ce "bilan carbone" des voitures électriques pourrait même devenir moins bon que celui des véhicules thermiques ou hybrides de dernière génération, au moins au niveau européen.
En France la situation est différente car 80-90 % de notre électricité est produite avec très peu d’émissions de CO2, principalement par le nucléaire, et l’hydraulique et marginalement par l’éolien (2 % de la consommation électrique en 2009). Mais la France produit et importe de l’électricité carbonée dès qu’elle doit faire face à des pics de consommation.
En 2007, par exemple, notre consommation nationale a dépassé pendant un mois et demi l’ensemble de notre production électrique à faible émissions de carbone et nous avons du avoir recours aux centrales thermiques et à l’électricité importée fortement carbonée. Si l’on fait l’hypothèse d’un parc automobile tout électrique, il faudrait augmenter de 50 % notre production totale d’électricité pour faire rouler nos 30 millions de voitures, ce qui représentent 270 TWh en plus par an, c’est à dire plus que la totalité de la production d’électricité nucléaire actuelle (241 TWh en 2008). Outre les investissements considérables que cela suppose, il n’est pas certain que notre société accepterait ce doublement de notre parc nucléaire.
Alors la voiture électrique est-elle condamnée à une marginalité éternelle ? Pas forcement mais à condition de rester réaliste et d’envisager l’équation énergétique dans toute sa complexité. Tout d’abord il faut intensifier les recherches pour mettre au point de nouvelles batteries. Ensuite il est indispensable de développer l’utilisation de petits véhicules hybrides rechargeables de nouvelle génération. Mais il faut surtout suivre avec attention le développement des futurs véhicules à hydrogène.
Au Japon, treize groupes pétroliers et compagnies de gaz japonais viennent d’annoncer qu’ils travaillaient ensemble à la création d’un réseau d’approvisionnement et de stations d’hydrogène pour les futurs véhicules à pile à combustible. Ces groupes prévoient de partager leurs techniques et leur savoir-faire et de travailler en concertation avec les constructeurs automobiles, afin d’étudier les conditions d’une offre d’hydrogène "stable, viable, sûre, économiquement rationnelle, compétitive et respectueuse de l’environnement".
Aux Etats-Unis mais aussi en Europe et au Japon, Honda, Hyundai, Nissan, Mercedes, General Motors, Ford ou encore BMW ont lancé des programmes de recherche. Mardi 23 juin, Toyota a même annoncé lors de l’assemblée générale des actionnaires le lancement en 2015 d’une voiture 100 % électrique dotée d’une pile à combustible. Ce mois-ci, Riversimple, une entreprise britannique, a dévoilé un concept car carburant à l’hydrogène, l’Urban Car, qu’elle espère commercialiser en 2013. En France l’hydrogène n’est pas la priorité des constructeurs qui misent plutôt sur la voiture électrique mais on peut se demander si, à terme, ce choix sera pertinent car les nanotechnologies pourraient bien permettre de résoudre plus vite que prévu le problème du stockage de l’hydrogène dans les voitures.
On voit donc qu’il n’existe pas de solution technologique "miracle" et unique pour développer la voiture propre et qu’un effort de recherche considérable est encore nécessaire dans ce domaine, sans exclure aucune voie. Mais nous devons également être bien conscients que la généralisation de véhicules plus propres et moins émetteurs de CO2 ne suffira pas à surmonter le défi majeur constitué par le réchauffement climatique et que nous devons également diminuer "à la source" nos besoins de déplacements et modifier l’organisation de nos sociétés en nous interrogeant sur l’étalement urbain et nos choix en matière d’urbanisme. Il faut notamment que nous réduisions l’immense décalage entre les potentialités des technologies de l’information et le faible recours au télétravail et aux télé activités.
Comme je l’imaginais déjà en 1999 dans un éditorial d’@RT Flash,(Edito de 1999) les pouvoirs publics de tous les pays qui doivent affronter une circulation urbaine de plus en plus surchargée et polluante doivent tout mettre en œuvre avec les leaders technologiques qui en ont maintenant la capacité pour faire en sorte que dans toutes les grandes cités mondiales tous les déplacements soient entièrement automatisés et utilisent des petits modules (totalement automatiques) non polluants et non dangereux. Si les pouvoirs publics décident à l’échelle de la planète que dans 20 ans au plus, il n’y aura plus un seul moteur thermique dans nos villes, qu’il n’y aura plus un être humain qui conduira une voiture en ville, alors OUI, l’Humanité ressentira que l’Homme vient de faire un grand geste pour l’avenir de notre planète.

Auteur

René TREGOUËT (www.tregouet.org). Sénateur honoraire, fondateur du Groupe de Prospective du Sénat
Ref: http://www.notre-planete.info/actualites/actu_2115_voiture_electrique_solution_miracle.php

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